Project Gutenberg's L'Illustration, No. 3740, 7 Novembre 1914, by Various
This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and most
other parts of the world at no cost and with almost no restrictions
whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of
the Project Gutenberg License included with this eBook or online at
www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you'll have
to check the laws of the country where you are located before using this ebook.
Title: L'Illustration, No. 3740, 7 Novembre 1914
Author: Various
Release Date: May 5, 2019 [EBook #59442]
Language: French
Character set encoding: UTF-8
*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'ILLUSTRATION, NO. 3740, 7 NOV 1914 ***
Produced by Juliet Sutherland, Hans Pieterse and the Online
Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net
Au lecteur.
Cette version numérisée reproduit intégralement le texte
original, et l’orthographe d’origine a été conservée. Seules
quelques erreurs typographiques évidentes ont été corrigées.
La liste de ces corrections se trouve à la fin du texte.
La ponctuation a également fait l’objet de quelques corrections
mineures.
L’ILLUSTRATION
_Prix du Numéro: Un Franc._ _72e Année.--Nº 3740._
SAMEDI 7 NOVEMBRE 1914
[Illustration: UNE JOURNÉE HISTORIQUE DE L’AMITIÉ FRANCO-BELGE
G{al} JOFFRE--M. DE BROQUEVILLE--M. MILLERAND--LE ROI--M. POINCARÉ
Le roi Albert et le président de la République française, suivis
de M. Millerand, du général Joffre et de M. de Broqueville,
pénètrent dans l’Hôtel de Ville de Furnes, à quelques kilomètres
du front de combat, le 1er novembre.
_Voir l’article, page 339._]
LES GRANDES HEURES
LES ANONYMES
Combien est grande la détresse du soldat qui n’a sur sa tombe de
bataille hâtivement creusée et parée qu’une croix de bois où déjà
s’efface une inscription devenue illisible! Et pourtant cette détresse
est avantageuse encore et privilégiée si vous la comparez à celle des
morts _perdus_, disparus à jamais, engloutis dans les profondeurs
de l’immense inconnu, comme le marin dans le sein des flots. Devant
le petit tumulus des premiers on peut au moins se dire: «Un homme
est là qui est tombé pour son pays. Je ne sais pas quel il est... je
sais qu’il est là.» Il ne m’en faut pas plus pour que mon esprit se
recueille et que le renflement de terre s’offre à mes deux genoux
comme un parfait prie-Dieu... Mais s’il n’y a pas de tumulus, pas de
croix, pas d’écriteau, même pas ce léger renflement, si vite affaissé
et aplati, qui m’indique à moi, défunt de demain, la place du vivant
d’hier et si cependant, malgré l’absence totale de signes extérieurs,
quels qu’ils soient, je suis amené à me poser, dans le doute, la
question terrible: «Peut-être y a-t-il là des morts? oui... des morts
dissimulés et que rien ne révèle?»... si je dois, en ce cas, les
prévoir, les soupçonner, les chercher, les deviner et les trouver,
dans une certitude uniquement morale, et les repérer en quelque sorte,
partout et nulle part, contre toute apparence matérielle,... alors
j’éprouve une espèce de mal affreux et d’angoisse désolée. Ces morts
anonymes m’obsèdent. Je reconstitue leur obscure Iliade.
Pourquoi, plus que d’autres, étaient-ils voués à la radiation complète,
irrévocable? Est-ce exprès, intentionnellement qu’ils furent supprimés,
sans que l’on en parlât, sans qu’ait été publiée la moindre mention
publique de leur décès et du lieu de leur sépulture? Non! Si l’on n’en
a rien dit, ce n’est ni par oubli ni par indifférence, _mais parce
qu’ils étaient trop et qu’on n’a pas eu le temps_! Ils formaient un
«ensemble», ils constituaient le champ prodigieux et illimité de la
future récolte, aussi sont-ils tombés par centaines, par milliers, et
bien davantage, comme se couchent sous la faux les innombrables épis,
et, de même qu’eux, ils sont demeurés impersonnels par la continuité
magnifique et inépuisable de leur chute... Quand on célèbre la beauté
de la moisson, s’inquiète-t-on de l’histoire et du passé de chaque
tige? Nul ne s’en préoccupe; on ne songe qu’au pain qui nourrira les
hommes. Mais il n’est pas défendu à quelques rêveurs équitables retenus
en arrière d’essayer de citer, sans les connaître, ces héros innommés
qui n’ont pas brillé dans les ordres du jour et qui méritaient, plus
d’une fois, d’y figurer, ces soldats simples, sans orgueil, qui par
rangées toutes pareilles se sont succédé à terre, étendus roide le jour
ou dans les ténèbres, et qui défigurés par l’obus ou par le masque de
l’agonie ont tout perdu, jusqu’à leur ressemblance... sur lesquels n’a
pu être retrouvée la médaille d’étain attachée à leur poignet par un
cordon noir... ceux qui, frappés, ont été mourir à leur aise dans des
coins, dans des cachettes où on ne les a découverts qu’au bout d’une ou
deux semaines... ou bien qui, broyés par les roues des caissons et les
sabots de la cavalerie, offraient une vue insoutenable et qui ont pour
ainsi dire exigé eux-mêmes qu’on les inhumât tout de suite, sans les
regarder, dans un infernal désarroi, en détournant les yeux d’horreur
et de compassion... et ceux encore que l’on a dû, pour plus de hâte,
incinérer, comme font les Indiens des bords du Gange qui sont venus ici
promener leurs turbans.
Tous ceux-là... c’est sur eux qu’en ces jours d’inexprimable deuil je
me penche, avec une torche à la main, pour tâcher de les discerner et
de les éclairer dans le gouffre mystérieux de la fosse commune. Pauvres
gens! Ils n’ont rien demandé et on ne leur a rien accordé, même pas une
planche où soient tracés deux mots. Ils ont été «évacués» sans un merci
nominatif. Ils ne sont pas difficiles. D’ailleurs nous sommes sûrs que
s’ils retrouvaient la parole ils ne réclameraient pas. Ils diraient:
«C’est bien ainsi.» Et cependant, pour leurs parents, pour ceux qui les
aimaient, ils seront maintenant des morts plus écartés, très différents
des autres, ils demeureront _des disparus_, ceux qui, à partir d’une
certaine date ont cessé de donner signe de vie, sans que malgré toutes
les recherches, on ait jamais eu ensuite un seul indice et le moindre
détail relatifs aux circonstances et à la façon dont ils ont été rayés
du nombre des humains. Leur famille désemparée se sentira éternellement
«coupée» d’eux, plus privée de leur absence que si l’on savait où sont
présents leurs restes inanimés. Car c’est une oppression à nulle autre
pareille--quand il s’agit d’un mort--que d’être «dans le vague» et de
se répéter sans relâche: «Où sont-ils?» Voilà la question. Ici? Là?
Plus près? Plus loin? En Alsace? Dans les Vosges? Dans l’Aisne? Dans la
Marne? En haut? En bas? On s’est battu dans tant d’endroits que l’on
est mort un peu partout! Comment savoir? Quel embarras!
Les soupirs montent à nos lèvres et les larmes à nos yeux...
Arrêtons-les. Dominons-nous... Regardons ces morts sans fléchir et ne
les plaignons pas. Leur anéantissement, qui nous semble plus profond,
n’est qu’une trompeuse apparence. Anonymes, ils ont la gloire solide et
sûre des forces qui ne sont profitables qu’à la condition de demeurer
secrètes. Leurs moyens isolés, épars, remportent le succès du faisceau
et de la cohésion, précisément par le sacrifice de la personnalité.
Beaucoup plus ambitieux parce qu’ils sont plus détachés, ils
_n’obtiennent_ qu’en _renonçant_, jusqu’à la fin, même après la vie.
Grâce à cette manière ils deviennent les sources cachées, mais les plus
actives et les plus riches, de la vie nouvelle prête à jaillir, ils
sont l’humus, l’engrais miraculeux de l’idéal futur, le terrain spécial
de la résurrection, le domaine public de l’immortalité. Quoi? Des
tombeaux courants? Des petits carrés? Des morceaux de patrie chichement
mesurés, au centimètre? à eux? Des plates-bandes à ces géants? Vous n’y
pensez pas?... Ils ont davantage et méritent mieux. Ils sont l’Armée,
l’armée innombrable, obscure et magnifique, la masse, la houle, le
flot débordant auquel tout appartient: les espaces illimités qu’ils
ont couverts de leurs nappes épaisses, toutes les régions qu’ils ont
gagnées en y passant, les sols marneux, les craies de Champagne, les
dunes de Flandre, les sables mouvants, les pics, les marécages...,
toutes ces étendues sont leur bien, leur empire... et c’est à peine
suffisant. L’incertitude, l’ignorance même de la place insoupçonnable
où ils se sont tous si savamment tapis, communique à leur sépulture
un vaste et spécial mystère. Ainsi, respectons, puisqu’ils l’ont
voulue, l’énigme de leurs os. Comprenons qu’en acceptant de ne les
chercher nulle part, nous les trouverons mieux partout, et ne les
rapetissons pas en prétendant les localiser. Vainqueurs posthumes, ils
s’assimilent au sol par une liaison plus étroite et justifiée, ils
ont la plus pure et la plus certaine des «concessions», parce qu’elle
est presque immatérielle. Personne ne peut profaner leurs restes
insaisissables. Ils échappent aux méfaits des survivants, aux caprices
de l’ingratitude, et leur dépouille n’ayant pas reçu d’éphémères
honneurs sera plus longtemps vénérée. Ils auront les soins assidus de
la nature dont le tranquille zèle jamais ne cesse et ne se ralentit,
dont la mémoire est régulière. Sur eux l’herbe verte, les fleurs, la
neige et les feuilles mortes seront toujours renouvelées.
Aussi ne pourra-t-on plus fouler un champ, se baisser sous les
branches, traverser une prairie... regarder simplement à terre sans
ranimer l’image inconnue de ces morts et les envelopper d’un grand
manteau d’amour. Nous les sentirons avec nous, plus mêlés à la vie,
plus libres, ayant des coudées plus franches que s’ils étaient relégués
dans l’enceinte des nécropoles... Ils feront partie des saisons. L’an
prochain devant un blé plus beau, devant une vigne plus lourde, on
dira: «Ce blé qui mûrit vient du fond de leurs entrailles... Le sang de
cette grappe est le vin de leur cœur...»
*
* *
Et à côté de ceux-là, «_des anonymes de la mort_», en voici d’autres
qu’il faut également tirer de l’ombre et dévoiler: _les anonymes de
la vie_, les discrets acharnés du bien, les modestes du sacrifice et
les honteux du dévouement: sœurs de charité, infirmières, médecins,
brancardiers, bourgeois, employés, ouvriers, petites gens, passants de
la rue et des abords de la bataille, dont la guerre a fait des héros
qui refusent d’être en vedette.
Dans l’ordinaire, ils étaient «comme tout le monde». Mais la pitié,
la douleur, la colère patriotique, la furie de la compassion les ont
soudainement révélés aux autres et à eux-mêmes.
Quand la ville a été un matin secouée de terreur, qu’on a dit: «Ils
arrivent!» que sous l’aboiement des premiers boulets les habitants
se sont enfuis dans un hallali d’épouvante... les anonymes de la
vie, qui auraient pu partir eux aussi et souvent dans d’excellentes
conditions, sont restés... d’abord en manière de blâme et de reproche
à la panique, et puis pour étayer ceux qui étaient forcés de demeurer,
que tout et rien ne retenaient sans doute, mais qu’une irrésistible
puissance de tendresse et de déchirement clouait et attachait à leur
cité, au quartier, à la maison, à la chambre, à leur bien, à ce qui
avait été jusqu’à ce jour leur courte joie sur la terre... Ceux-là
méritaient maintenant qu’on les aidât, qu’on ne les lâchât pas... Au
noble soin de rallier leur détresse et de protéger leur impuissance,
_ces anonymes_ se sont voués, de toutes parts, avec un courage qui
imposera l’admiration et le respect pour des siècles. Des femmes, des
jeunes filles de hardiesse virginale, des timides citoyens galvanisés
de bravoure, des prêtres, des vieillards, des hommes de devoir, de
sagesse et d’autorité ont surgi d’entre les blessés et les morts, sont
nés des cendres et des ruines, pour être à la hauteur du désastre et
pour élever les âmes au-dessus des panaches de l’incendie. Rien ne
leur fut impossible. Organiser la résistance et le salut, atténuer le
ravage, aller au-devant de l’ennemi sans attendre qu’il vienne à vous,
avoir mieux que du cœur: de la tête, parler la voix tranquille et les
yeux clairs aux officiers casqués, discuter avec eux, débattre pied
à pied le chiffre de l’impôt du sang et s’offrir soi-même en otage,
faute de mieux; donner sa vie en caution, tomber enfin d’accord forcé
sur la somme et courir par les rues fumantes la quêter, la réunir, la
rapporter en tas et puis subir alors des exigences nouvelles, être
pressuré davantage, contraint de retourner obéir à ces prétentions
exorbitantes, et au milieu de tout cela, que l’on réussisse ou que
l’on échoue, se maintenir en belle allure morale et en dignité
française... quoi qu’il puisse arriver!... c’est ce qu’ont fait pendant
des jours et des semaines, des êtres surhumains, merveilleux, qui se
sont multipliés, épuisés en marches, en paroles, en raisonnements, en
discussions serrées, en ripostes troublantes, qui ont accompli des
prodiges d’adresse, d’éloquence palpitante et fière pour essayer, sinon
d’attendrir, du moins d’ébranler et de convaincre le Teuton... et qui
plusieurs fois, par la logique, la raison, le bon sens, le tour et la
présence d’esprit de leur volonté, y sont presque parvenus... Autre
guerre dans la grande, et faite, elle aussi, sous les balles, pendant
qu’éclatent les obus, que crépitent les toits en flammes.
Et ce sont toujours ces mêmes _anonymes_ qui, entre les chevaux des
uhlans, ont suivi à pied, ont été conduits hors de la ville nu-tête, au
vent du désastre, comme dans les peintures du moyen âge, qui ont été
menacés du fusil, de la corde et du revolver, que l’on a mis en joue et
que l’on a relâchés... quand on a vu qu’ils n’avaient pas peur.
Faut-il aussi parler des secours matériels, spirituels, des remèdes,
des soins, des soupes, des viatiques de toutes sortes qu’ils ont portés
parmi les éboulements? des victimes qu’ils ont sauvées _in extremis_,
des réfugiés qu’ils ont retirés des caves après qu’ils les y avaient
cachés, des prêtres et des médecins qu’ils ont été quérir à tout prix
et qui sont venus, par le plus court chemin,... des enfants qu’ils
ont ravis sous leurs manteaux, dans une fuite atroce, comme s’ils les
volaient?... Pensez-vous aux escaliers de maison vacillante, de tours
prêtes à crouler, de clochers et de souterrains montés et dégringolés,
quatre à quatre, sous la pluie d’enfer...? Et les nuits sans sommeil,
prolongées à tant écouter! où l’heure est martelée chaque minute,
chaque seconde par un abominable fracas qui ne se tait jamais! Et les
prières suprêmes! les baisers du dernier soupir! les sanglots retenus
quand on n’en peut plus et que l’on se croit au moment décisif et
convoité de paraître devant Dieu... Enfin! Enfin! Plus de terre!
Eh bien, après avoir vécu toutes ces grandeurs et toutes ces horreurs,
et en avoir triomphé, par miracle, après avoir vu venir et repartir
l’Allemand, après avoir espéré, désespéré, souffert l’inimaginable
et surmené toutes les forces de leur corps et de leur cœur... les
«anonymes de la vie» _ne veulent pas qu’on en parle_, à eux ni à
personne... Vous les interrogez, vous leur demandez: «Qui êtes-vous?
Votre nom?--Inutile, vous disent-ils, nous ne sommes rien. Ne me nommez
pas, je vous le défends.--Mais pourquoi? Il faut pourtant bien que
j’apprenne à l’univers qui a fait toutes ces actions?--Non. Ou alors,
dites que c’est la Ville! C’est Reims, c’est Lille, c’est Arras. Ce
n’est pas nous. Nous autres nous disparaissons. Nous avons joué notre
rôle. Ne nous recherchez pas. Nous rentrons dans les catacombes, dans
la cellule de notre vie.»
Ah! cela! c ’est le sommet du magnifique, le sublime qui déconcerte!
Puisque vous aussi, humbles et glorieux combattants, vous voulez, comme
la foule des soldats tombés, rester à l’écart et dans l’ombre après
la bataille, nous exaucerons votre vœu. Mais malgré vous, plus tard,
le secret percera... Si vite qu’en vous effaçant vous glissiez dans
l’avenir, par les rues de vos villes dévastées et reconstruites, le
long de vos cathédrales toujours debout, on saura vous deviner. Vous
ne passerez plus qu’au milieu d’un murmure ardent de reconnaissance.
On vous désignera d’une main qui bénit: «Celui-là, cet homme à barbe
blanche... Cette mère et sa fille... au tournant du parvis... Ils en
étaient... Sans eux!... Ce sont nos bienfaiteurs! les sauveurs, les
gardiens de la cité!
HENRI LAVEDAN.
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE A DUNKERQUE ET A FURNES
M. Raymond Poincaré vient, pour la seconde fois, de passer quelques
jours au milieu des troupes: voyage de bon augure, qui a coïncidé avec
d’heureuses nouvelles du front, et qui a été marqué, pour le président
de la République, par deux visites d’un haut intérêt.
Arrivé à Paris le jeudi 29 octobre, M. Poincaré consacrait tout
d’abord ses deux premières journées de séjour à visiter les gares où
passent les blessés, divers hôpitaux où ils sont soignés, à rendre
hommage, à la veille de la Toussaint, aux morts inhumés dans les
cimetières militaires des environs de Paris. Samedi, guidé par le
général Galliéni, le chef de l’Etat parcourait plusieurs sections du
camp retranché de Paris, s’intéressant à l’installation des travaux
de défense, descendant alertement dans les tranchées, et surtout
félicitant chaleureusement les nombreux territoriaux qu’il rencontra
à leur poste, de leur entrain, de leur zèle, de leur patriotique
dévouement. Enfin poussant jusqu’aux champs de bataille de la Marne, il
y saluait de nombreuses tombes de combattants anglais ou français.
Le lendemain, dimanche, M. Raymond Poincaré partait pour Dunkerque.
M. Millerand, ministre de la Guerre, l’accompagnait. A Dunkerque, ils
rencontraient lord Kitchener, ministre de la Guerre britannique, M. de
Broqueville, ministre de la Guerre de Belgique, et, tout naturellement,
le général Joffre. Des longs entretiens qui eurent lieu résulta, plus
que jamais, la certitude d’un accord complet entre les alliés. Le soir,
le président retenait à dîner M. de Broqueville et lord Kitchener.
Puis, dans la nuit, le chef du War Office repartait pour Londres.
Lundi, le président de la République, en compagnie du ministre de la
Guerre, du général Joffre et du général Duparge, secrétaire général
de la Présidence, franchissant la frontière, se rendait en Belgique
saluer le roi des Belges et sa vaillante armée. Le roi Albert, informé
de ce projet, était venu au-devant de ses hôtes jusqu’à la frontière.
Rien ne saurait dire la cordialité, la chaleur de cette entrevue, en
un pareil moment. En termes émus, M. Poincaré exprima de nouveau à
l’héroïque souverain sa fervente admiration, celle de la France entière
pour la magnifique attitude de la nation et de l’armée belges groupées
derrière leur roi, et les vœux que tous nous formons pour la Belgique,
dont la cause, autant que la nôtre, nous est sacrée; le remerciant, le
roi Albert fit un vif éloge de l’armée française. Puis il conduisit, en
automobile, à la résidence royale, le président, qui put offrir à la
reine ses respectueux hommages.
De là, les deux chefs d’Etat, avec les deux ministres de la Guerre et
le général Joffre, gagnaient Furnes, que nos avions protégeaient contre
les taubes. Des troupes, belges et françaises, étaient massées sur la
place de l’Hôtel-de-Ville. Le roi et le président, aux accents de la
_Marseillaise_ et de la _Brabançonne_, les passèrent en revue. Une
longue et affectueuse entrevue suivit, dans l’un des salons de l’Hôtel
de Ville, à la suite de laquelle le roi tint encore à reconduire M.
Raymond Poincaré aussi loin que possible, dans la direction d’Ypres,
où opèrent avec une endurance, une ardeur admirables, des troupes
françaises au milieu desquelles le président, le ministre de la Guerre
et le généralissime allaient terminer leur journée.
LES HÉROS DE NOTRE PAYS
LETTRE DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL DANS LE NORD
31 octobre 1914.
Je voudrais que _L’Illustration_ me permît de donner à cet article le
premier titre que j’avais choisi: _Chez les poilus du..._
Le terme vous crispe un peu la bouche?
C’est que vous n’avez pas entendu le jeune chef qui les commande
prononcer: «Mes poilus!» Il articule cela avec une soudaine
camaraderie, en avançant légèrement le menton et en arquant les lèvres;
il appuie sur les syllabes, hausse le ton, sourit des yeux, paraît,
à la fois, se contraindre à la trivialité et résister au souffle
d’orgueil qui l’entraîne,--et le mot, aussitôt, vous entre dans
l’esprit avec l’état civil qu’il faut pour qu’on ne lui discute plus
le droit de se faire une place dans votre vocabulaire. Si vous aviez
entendu le colonel P... le lancer, vous l’emploieriez sans gêne et vous
en éprouveriez une satisfaction pareille à celle qui vous saisit en
revêtant un costume qui vous sied ou en maniant un objet nouveau dont
la forme vous enchante.
Et si vous connaissiez les poilus, donc!
Je veux vous en parler, parce que, durant cette semaine où le souvenir
de nos morts nous obsède, où l’atmosphère porte la mélancolie
renouvelée qui nous vient des journées étroites qui accourent et des
anciennes tristesses qui remontent, où, cette année, il y aura tant
de voiles et tant de larmes, où, déjà, nous ne nous défendons plus
d’appréhender l’ère des deuils qui suivra le temps glorieux de la
Victoire, je dois à ces diables terrés de telles heures d’enthousiasme
et une allégresse si réconfortante que je voudrais vous les communiquer.
Vous vous imaginez que la vie dans les tranchées est lugubre, que les
visages y sont marqués de chagrin, que les épaules s’y voûtent, que le
meilleur de notre gaieté est noyé, qu’il n’y a de place que pour les
entretiens sévères et pour les chuchotements?
Détrompez-vous, sous peine de faire injure à nos frères qui combattent.
Les héros de notre pays n’ont pas, d’ordinaire, cette allure de
condamnés. Ce sont de simples hommes, un peu plus gais que de coutume,
qui s’accommodent sans façon de tout ce qu’ils ne peuvent éviter de
désagréable et qui, pour le reste, se «débrouillent», chacun d’eux
selon ses facultés.
Je reviens de chez eux les muscles retrempés, l’esprit fouetté, le
cœur gonflé, la tête bourrée d’histoires, mais je ne puis me faire à
cette idée que, sous l’invisible réseau des obus et des balles, posté
en pleine bataille, je n’ai rien vu de la bataille. Des champs vides,
des moulins à vent démolis, des bois au pied desquels jaillissent
à l’improviste les bouquets noirs des gros obus ou bien de petits
nuages blancs qui s’accrochent subitement à la lisière, se gonflent et
disparaissent... C’est tout ce que l’on surprend de la bataille! Quant
à ce que l’on entend, c’est une autre affaire...
*
* *
Mais je veux vous parler des poilus!
Il y avait fête chez eux, l’autre jour. On décorait un jeune aide-major
qui, en pleine action, aux environs de Capy, était allé ramasser
des blessés et s’était trouvé pris dans une dégelée de mitraille.
Ils étaient trois ou quatre à sa mesure qui, sans se préoccuper de
la musique infernale du plomb et de l’acier, acharnés à leur tâche,
faisaient des pansements comme à l’hôpital, quand un shrapnell éclata
au-dessus d’eux; on se regarda, on se compta, quelqu’un envoya un bon
mot et l’on se remit à la besogne. Mais un autre projectile arriva;
celui-ci était un obus qui tomba au milieu du groupe, tua des blessés,
en blessa d’autres à nouveau et coucha tout le monde. Le médecin-major,
qui commandait le service, se redressa et, s’apercevant que son aide ne
mettait pas assez de hâte à l’imiter, lui cria:
--Dites donc, cher ami, la pause n’a pas sonné!
Et l’autre de répliquer paisiblement:
--Pardon, monsieur le médecin-major, mais je crois que j’ai l’humérus
brisé.
C’est, ma foi, une belle réponse de médecin qui ne perd pas l’esprit!
Il avait bien l’humérus brisé... les «circonstances» n’avaient pas
troublé son diagnostic.
On l’a décoré cette semaine.
[Illustration: L’arrivée du colonel: devant le drapeau déployé, se
tient le héros de la fête.]
[Illustration: La visite de l’aide-major Lucien à ses camarades,
après la cérémonie.]
UNE CÉRÉMONIE MILITAIRE SUR LA LIGNE DES TRANCHÉES.--La remise de
la croix de la Légion d’honneur à un aide-major blessé.
Quelques jours avant, le colonel P... lui avait écrit: «Vous avez la
croix.
Je pourrais vous l’envoyer à l’ambulance; je préfère vous la remettre
sur le front. Vous nous manquez, nous serons tous contents de vous
revoir...»
Et l’on a conduit l’aide-major Lucien sur le front, sur le front même,
à 600 mètres des tranchées allemandes, avec prise d’armes et drapeau
déployé.
J’étais de la fête et c’est une des plus belles fêtes de ma vie. Jamais
je n’ai vu plus de grandeur dans pareille simplicité, jamais semblable
cérémonie n’avait revêtu pour moi une telle signification! Et jamais,
non plus, le drapeau ne m’avait paru plus clair, plus gai, plus crâne,
plus beau, plus chérissable que sur cette route, au milieu de ces
cultures, dans cette plaine, au-dessus de laquelle, inlassablement,
depuis trois semaines, court le métal porte-destin.
*
* *
Pour atteindre l’endroit qu’avait choisi le colonel, il fallait
descendre à l’orée d’un boqueteau et franchir un joli petit espace
dénudé que les poilus de là-bas connaissent bien et qu’ils n’abordent
jamais sans grommeler: «Attention au fou!»
Mais vous ignorez ce qu’est le _fou_? C’est un Boche qui est perché
sur un arbre et qui tire sur tout ce qui s’agite de ce côté. Ils sont
peut-être plusieurs: n’importe! On prononce en entendant le sifflement
d’une balle: «Encore des nouvelles du fou!» Il serait, d’ailleurs,
parfaitement injuste de ne pas reconnaître que le fou est un excellent
tireur; le soir de ce jour-là, nous avons rencontré un soldat qui
pouvait l’affirmer, preuve au bras,--et la preuve était chaude.
Nous étions bien une vingtaine qui devions traverser la région
exploitée par ce maniaque et il y aurait eu, pour lui, un joli tableau
à faire; mais il faut croire que le perché mangeait sa soupe ou qu’il
ne voulait pas troubler notre fête. Nous passâmes par petits groupes, à
peine inquiétés par quelques mouches, qui sont nombreuses cette année;
à 200 mètres de là, le piquet d’honneur avait pris les armes.
On aurait dit que chaque homme avait conscience du bon tour qu’on
jouait aux voisins. Les visages étaient épanouis, les yeux avaient des
éclairs malicieux; on s’amusait, allons!
Le colonel, lui aussi, prenait du bon temps. Pourtant, c’était le moins
insouciant; il aurait été si désolé qu’il y eût de la casse! De temps à
autre, l’oreille tendue, il levait les yeux vers la cime des arbres...
Une brindille se détacha d’une branche et tomba.
Enfin, la compagnie sortit de la tranchée, s’aligna et, aussitôt, un
commandement éclata:
--Présentez... arme!
A cet instant, le drapeau apparut sur la route.
On ne vit plus que LUI et je m’imaginai que, là-bas, tout près, on
devait suivre le jeu de son étoffe dans le vent. Il me semblait
immense, il me semblait éclatant: il était immense, il était éclatant
et l’officier qui le portait ne le diminuait pas.
Coupait-on encore du bois à la cime des arbres?... Nous ne nous en
préoccupions plus.
Une bordée de notre 75 nous calotta. Nous nous trouvions dans la ligne
de tir et le son nous arrivait, sec et dur, à croire que nous avions la
batterie à 100 mètres et que nous en recevions le souffle.
Et, pendant que le canon continuait à cogner, la parade se déroula,
sans hâte, sans bravade, strictement, gravement et gaillardement, à la
française! Le petit aide-major que l’on décorait était peut-être celui
qui dissimulait le mieux son émotion; il se tenait devant le drapeau,
sans plus de gêne que s’il se fût trouvé dans son laboratoire...
J’avais oublié de vous informer que c’était un agrégé de Nancy, un
_intellectuel_, comme l’on disait. Lorsque le drapeau défila, il lui
adressa un beau salut de la main gauche, à la manière d’un vieil
invalide qui est bien empêché de saluer de l’autre main; il n’avait
plus du tout l’air d’un intellectuel.
*
* *
Ensuite, le colonel, qui nous avait priés à déjeuner, nous introduisit
dans la salle à manger qui est de construction et de style 1914: trois
marches pour y pénétrer, des murs uniformément bruns--terre de Sienne,
si vous voulez--un plafond aux poutres apparentes sur fond de gerbes
de blé, assez haut pour permettre au plus bel homme du régiment de se
tenir debout sans courber la taille... Coquetterie: la table, à la
nappe blanche immaculée, était parée de fleurs.
Voyez-vous, il y a des détails qu’on ne trouve que chez nous et qui
sont la marque de notre âme.
[Illustration:
_Médecin principal Vieu._--_Colonel P..._--_Aide-major Lucien._
La salle à manger fleurie du colonel.]
Ces fleurs, sur cette table, dans une tranchée perdue au milieu des
champs de betteraves et des labours, loin de tout jardin, citait
la plus délicate joie des yeux pour excuser le plus détestable des
menus. Elle assaisonna le plus délicat des repas de guerre et je me
souviendrai de ce poulet Marengo avec autant de gratitude que je me
rappellerai le corton dont on l’arrosa.
Par un bienheureux hasard, la batterie qui était devant nous annonçait
chaque service et, quand nous en fûmes au dessert, les gros canons se
mirent de la partie.
Alors le colonel se leva et porta un toast, très court, très noble...
C’est vraiment une jolie figure que cet homme-là! Dans le labyrinthe de
ses taupinières, sur sa route ou sur le banc de terre de son «bureau»,
parmi ses hommes ou parmi ses officiers, il apporte partout une bonne
grâce limpide et aisée, une politesse mesurée, un souci d’élégance
de parfait homme du monde, mais tout cela marié à quelque chose de
discrètement strict et de martial qui chasse toute pensée de frivolité.
Ce matin d’octobre, quand, debout et le verre en main, il articula le
mot _France_, il me parut que le mot, qui avait tremblé dans sa gorge,
nous frappait en pleine poitrine.
Les circonstances y étaient pour leur part, bien sûr,--et le décor
aussi. Mais le ton et l’homme y étaient pour la leur. C’était un
_gentleman_ qui s’exprimait,--et mieux: un _gallant gentleman_.
Je ne vous ai pas encore entretenu de ses poilus! Je voudrais vous
en parler comme il en parle lui-même; ce serait rendre hommage aux
meilleurs soldats de France, à ceux de ce régiment et à ceux des
autres corps, à tous ceux qui vont au feu sans forfanterie, carrément,
gaiement, et à tous ceux qui, entre deux charges, se sont organisés,
dans leurs galeries souterraines, une existence de petits propriétaires
troglodytes,--chasseurs à l’affût toujours en éveil, silencieux, joyeux
et passionnés trappeurs.
GASTON CHÉRAU.
(_A suivre._)
[Illustration: Le commandant d’un groupe d’artillerie à son poste
de commandement: à sa droite, le téléphoniste qui transmet les
ordres.]
[Illustration: Batterie d’artillerie française de 75, dissimulée
sous des monceaux de paille et qu’aucun aviateur ne pourrait
repérer.]
[Illustration: Un groupe d’ennemis, tués net par un seul obus
explosif de 75, semblent dormir, dans des poses naturelles, au
pied d’un tas de bois.]
IMAGES DE GUERRE MODERNE
[Illustration: M. Poincaré.--Général Galliéni.
Le président de la République félicite de leur zèle les
territoriaux qui travaillent aux retranchements.]
[Illustration: Le Président et les généraux sont descendus au
fond d’une tranchée.]
[Illustration: Une tranchée-type d’infanterie.]
[Illustration: Lecture sur place de la carte.]
LE GÉNÉRAL GALLIÉNI FAIT VISITER AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
LE CAMP RETRANCHÉ DE PARIS
_Voir l’article, page 339._
[Illustration: Sur la place de l’Hôtel-de-Ville, à Furnes
(Belgique), l’automobile où ont pris place côte à côte le roi des
Belges et le président de la République française passe sur le
front des troupes qui saluent.]
[Illustration: Le Président et le Roi.--Général Joffre.]
LE ROI ALBERT, LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET LE GÉNÉRAL JOFFRE
A FURNES
_Voir la gravure de première page et l’article, page 339._
DEUX ENGAGÉS DE LA GUERRE DE 1914
Ces deux soldats fraternellement unis, et pourtant si dissemblables,
ont une bien belle histoire. La voici:
Dès les premiers jours d’août, quand éclata la guerre, le père D...,
un fils d’Auvergne, devenu petit commerçant dans la banlieue de Paris,
parut se transformer. Vieux sang ne saurait mentir. Il se souvenait
de son service militaire, au Tonkin, et aussi qu’il avait eu un oncle
tué à Reichshoffen. En dépit des objections des autorités et de son
épouse, il réussit à fonder une garde civique. Des individus à mine
équivoque rôdaient par le pays. Le fusil de chasse à l’épaule, le père
D... aperçut un jour un promeneur suspect. Par trois fois, il le somma
vainement de montrer ses papiers. Alors coup de feu à chevrotines...
Le père D... s’approcha. L’homme était à terre. Dans ses poches, des
statistiques, des plans de forts. Le maire, le commissaire spécial
furent mandés. On se transporta au domicile du personnage. On trouva
un uniforme de capitaine de la landwehr et l’ordre de rejoindre son
régiment à Paris! Le vieux chasseur fit un cran à sa ceinture: il avait
tué son premier _Boche_.
Mais ce n’était là qu’un préambule. Une obsession tourmentait le père
D... Il en avait bien touché un mot à son épouse, mais la digne femme
avait poussé les hauts cris. Et ses affaires, et ses enfants, et
elle-même! La guerre! A cinquante ans! Mais il était fou!
Un jour, enfin, il n’y tint plus et se présenta au bureau de
recrutement. On était peu disposé à l’écouter; mais il montra tant
d’éloquence qu’on finit par accepter ce vétéran à la barbe plus blanche
que grise, au nez orné d’une paire de lunettes.
Vers la mi-septembre, le père D... se trouvait sur le front. C’est
ici que l’épopée commence. Simple soldat à son arrivée au régiment,
il était promu caporal huit jours après, sergent dix jours plus tard.
Désirait-on des volontaires pour un coup de main? C’était toujours le
père D... qui de sa voix caverneuse répondait le premier: «Présent!»
Signalait-on là-bas, dans la tranchée, un tireur _boche_ trop adroit?
C’était lui qui se chargeait de le descendre. Le régiment donnait-il
tout entier à l’attaque? C’était encore lui qui se glissait au
premier rang. Il fut, avec son colonel, un brave entre les braves, le
merveilleux entraîneur de son régiment. Ce vieil homme, par son humeur
endiablée, son insouciance, son courage, donnait l’exemple à tous. Les
jeunes recrues lui demandaient conseil et ne redoutaient rien tant que
son blâme. Les trembleurs n’osaient se montrer devant lui. Au fait,
depuis qu’il était là, il n’y avait plus de trembleurs!
Voilà que l’assaut est ordonné contre une position qui domine ces
profondes carrières à sangliers où les Allemands se retranchent. La
nuit tombe. La tâche sera rude. Le colonel s’est porté en avant. En
tête des éclaireurs, il aperçoit le père D..., le corps plié, le fusil
à la main, l’œil aux aguets...
--Encore toi!
--Toujours moi, mon colonel.
--A ton âge! Mais tu n’es pas à ta place, ici!
--Vous non plus, mon colonel!
--Tais-toi! Je te fais adjudant!
[Illustration: Deux engagés de 50 et de 17 ans.]
... Beaucoup sont demeurés sur le plateau jonché déjà de tant de
cadavres! Mais la position a été enlevée à la baïonnette. Hélas! le
vieux sergent n’aura pas vu la victoire. A 1.200 mètres de la ligne de
tranchées, il a tiré le premier coup de fusil sur une ombre imprudente.
La tache noire s’est effondrée. Les obus, les fusils, les mitrailleuses
ont riposté. Un shrapnell a décoiffé d’abord le père D..., effleurant
son crâne. Le sang coule et l’aveugle:
--Hardi! les enfants. Et, si je tombe, ne perdez pas la direction. Le
groupe d’arbres, à gauche du croissant de la lune!
Il n’avait pas achevé qu’une balle lui brisait l’avant-bras droit. Il
tomba.
--Veux-tu bien me laisser là! A gauche du croissant, je te dis!
Il n’est plus bon à rien pour aujourd’hui... Rampant à travers les
betteraves, il a pu réussir à regagner la crête du plateau où des
ambulances l’ont recueilli.
Dans le train de blessés, le père D... a retrouvé sa bonne humeur:
--Une fracture, les gars! une simple fracture! Le sang est bon. D’ici
vingt jours, tout ça sera raccommodé. Comme adjudant, plus de fusil à
porter. J’aurai quand même plaisir à en descendre encore quelques-uns.
La musique des «boîtes à singe» et du «moulin à café» commence à me
manquer!
En style de guerre 1914 on désigne sous ces vocables l’obus et la
mitrailleuse.
A chaque station, le père D... baise galamment les mains des
demoiselles de la Croix-Rouge qui lui offrent de bonnes choses... Mais
une ombre passe sur son visage... Il soulève son képi et grattant,
de son geste familier, cette dure caboche auvergnate que les obus
allemands n’ont pu entamer:
--Tout de même, qu’est-ce que va dire ma femme quand je rentrerai à la
maison?...
Dans l’hôpital où est maintenant le père D... se trouve un autre engagé
volontaire, mais de la plus jeune génération, celui-là. Il n’a que
dix-sept ans. On appelle l’un le «vieux», et l’autre le «gosse». Ce
«gosse», enfant de Lorraine, a aussi quelques exploits à son actif.
Un Prussien qui avait réussi, un jour, à gagner nos lignes afin de
se faire capturer, assura que nombre de ses camarades l’imiteraient
volontiers. Le gamin, qui parle l’allemand, s’offrit pour l’accompagner
jusqu’à la tranchée d’où il s’était échappé. Au crépuscule, le plan
fut exécuté. Devant la tranchée que nul officier ne surveillait à cet
instant, Français et Allemand vantèrent les charmes de la captivité.
Plus de coups de schlague, une bonne nourriture, finie la corvée!
Dix-huit lâches se laissèrent convaincre et abandonnèrent leur poste
pour les suivre... Le cortège désarmé se mit en marche... Mais bientôt
les autres Allemands, revenus de leur surprise, ouvraient le feu... Une
batterie entra même en action:
--Je franchissais nos lignes avec mes dix-huit prisonniers et mon
guide, raconte le «gosse», quand j’entendis siffler un obus. J’ai trop
d’expérience pour ne point connaître à l’avance où un obus va tomber.
Celui-là nous arrivait en plein dessus. Alors, je poussai brusquement
mon guide devant moi... Pfuitt! Boum! C’était un bon diable, ce
_Boche_... Il m’avait été utile... Mais que voulez-vous? Il a tout pris!
Lui en fut quitte pour une forte contusion. A l’hôpital, les majors, le
voyant surmené, voulurent le rendre pour un mois aux jupes de sa mère.
Mais le «gosse» n’entendit pas de cette oreille. Dans quelques jours,
avec le «vieux», il retournera au front.
[Illustration: Officiers de highlanders d’outre-Atlantique.]
[Illustration: Étendard du régiment d’Infanterie Princesse
Patricia.]
LES CONTINGENTS CANADIENS DE L’ARMÉE BRITANNIQUE OPÉRANT EN
FRANCE
[Illustration: LE JOUR DES MORTS (1914)
_Dessin de LUCIEN JONAS._]
[Illustration:
RENCONTRE NOCTURNE
_Dessin de GEORGES SCOTT._]
_Il y aura, en des temps plus calmes, tout un véritable
«romancero» à écrire sur le rôle de l’automobile et la vie des
chauffeurs en campagne. Il sera fertile en péripéties émouvantes,
et neuves, surtout, et pleines d’imprévu. Que de rencontres
étranges ainsi, au coin d’un bois, au détour d’une route, où
l’homme du volant dut rivaliser de sang-froid avec son compagnon,
son garde du corps! Que de traits élégants où l’esprit français,
fertile en ressources, triompha de la lourdeur ennemie et où,
grâce à un coup de volant décisif, à l’allumage brusque des
phares électriques qui effraie les chevaux, ou enfin à quelques
adroits coups de fusil, furent sauvés la voiture et ceux qui la
montaient!_
[Illustration: Peloton de hussards français dans les brouillards
de la Somme: un renseignement]
[Illustration: Les lanciers de l’armée britannique prennent grand
soin de ménager leurs montures.]
LA CAVALERIE LÉGÈRE DES ARMÉES ALLIÉES
[Illustration: LE DÉNOUEMENT D’UN DUEL AÉRIEN: VAINQUEUR ET VAINCU
_Dessin de GEORGES SCOTT, d’après le croquis d’un témoin
oculaire._]
Si les aviateurs des diverses armées alliées accomplissent
chaque jour des prouesses, ces exploits n’ont en général pour
témoins que les bataillons ennemis; les nôtres les connaissent
seulement par le rapport ou... par les journaux. Pourtant, il
n’est pas un soldat du front qui ne rêve d’assister à un combat
aérien, prêt à applaudir aux derniers tournoiements de l’avion
allemand blessé à mort. De ces rencontres il n’a encore été
pris, il ne sera peut-être pris aucun cliché. Des indications et
un croquis fournis par un spectateur du combat que nous avons
déjà mentionné (numéro du 24 octobre) ont du moins permis d’en
représenter très exactement la phase finale. C’était à Jonchery,
près de Reims. Un avion allemand, du type «Aviatik», après
avoir survolé nos troupes, se préparait à regagner son camp.
Aussitôt, le sergent Frantz et le soldat Quenault s’envolent sur
un biplan armé d’une mitrailleuse. Arrivé à une grande hauteur,
l’appareil français attaque son adversaire de flanc: bientôt le
moteur de celui-ci explose, déterminant l’incendie de l’appareil
qui s’abat lourdement dans les lignes françaises. Des deux côtés
les soldats étaient sortis de leurs tranchées pour mieux suivre
les péripéties du drame. Tandis que les débris de l’ «Aviatik»
achevaient de flamber près de deux corps carbonisés, ils virent
le biplan français descendre majestueusement, en décrivant de
grands orbes autour du brasier.
[Illustration: LE CHAMP DE BATAILLE DES FLANDRES ET DE L’ARTOIS
_Croquis panoramique par L. TRINQUIER_]
[Illustration: LES FUNÉRAILLES DU ROI CAROL Ier DE ROUMANIE A
BUCAREST
Le char funèbre, suivi par le cheval favori du souverain, par
le nouveau roi Ferdinand Ier (que désigne le signe ×), marchant
entre ses fils, les princes Carol et Nicolas, et par un immense
cortège, passe sur le grand boulevard Lascar-Catargiu.
_Photographie C.-G. Basiliad, prise le 12 octobre, et parvenue
à Paris le 30 seulement, par suite des difficultés des
communications._]
[Illustration: Les mêmes deuils que chez nous: une femme et
ses enfants devant le corps d’un volontaire serbe mort de ses
blessures.]
[Illustration: Les mêmes tranchées que sur les lignes de l’Aisne
en Bosnie, devant les hauteurs occupées par les Autrichiens.]
LA CAMPAGNE SERBE CONTRE L’AUTRICHE
_Phot. de notre correspondant, S. Tchernoff._
[Illustration: LE GOUVERNEMENT BELGE AU HAVRE.--Une cérémonie
quotidienne: chaque matin, devant l’hôtel affecté au ministère
de la Guerre de Belgique, les couleurs nationales belges sont
hissées au sommet d’un mât et saluées par la garde ainsi que par
le personnel et les officiers du ministère.]
LA QUATORZIÈME SEMAINE DE GUERRE
29 OCTOBRE-4 NOVEMBRE
La bataille continue avec une violence croissante sur tout l’immense
front de la mer du Nord à la plaine d’Alsace; mais entre la Lys et
la mer se joue sans doute la partie décisive. Si ardente que soit la
mêlée dans beaucoup de régions, nulle part autant d’hommes ne sont aux
prises; nulle part autant de races humaines ne participèrent à une
guerre; nulle part aussi une telle accumulation de moyens d’attaque
et de défense n’a encore été constatée. La bataille du droit et de la
civilisation contre la barbarie a recruté des soldats jusque parmi les
peuplades variées de l’Inde, les Arabes et les Berbères de l’Afrique du
Nord, les nègres de l’Afrique occidentale. Les navires de l’Angleterre
et de la France prennent une part considérable et glorieuse aux combats
sur la terre ferme; l’aviation y participe par des flottes aériennes
plus considérables et plus agissantes que celles jusqu’ici mises en
ligne. Lorsqu’on connaîtra par le détail tous ces événements qui nous
sont à peine révélés, les fictions les plus extraordinaires de Jules
Verne et de ses imitateurs paraîtront bien dépassées.
Toute la semaine, les Allemands ont déployé une activité confinant
à la furie. Ce n’est pas seulement vers Dunkerque et Calais qu’ils
ont voulu percer: leurs opérations contre Arras paraissaient menacer
Boulogne; en Picardie, ils voudraient trouer dans la direction
d’Amiens; sur l’Aisne, on dirait qu’ils veulent retourner vers l’Ourcq
et la Marne; par l’Argonne, la Meuse et la Woëvre, ils tentent
d’envelopper Verdun; enfin du côté de la Seille, ils poussent de
nouvelles pointes sur Nancy. Chaque jour les communiqués employaient
les mêmes termes: «Violentes attaques sur tout le front.» Ces attaques
ont été presque partout infructueuses, malgré l’effrayante consommation
d’hommes qu’elles ont demandée à l’ennemi. C’est à plus de 200.000
que le colonel Repington, du _Times_, évalue le nombre des soldats
sacrifiés par le commandement allemand depuis un mois. Cette semaine
particulièrement sanglante s’est achevée par des symptômes de victoire
qu’a soulignés la visite du président de la République à nos vaillantes
troupes et par l’excursion sur le front même de la bataille, accomplie
par M. Poincaré en compagnie de l’admirable roi des Belges.
LA BATAILLE DES FLANDRES
Les Allemands ont d’abord porté leur principale action sur les bords
de l’Yser, entre l’embouchure du petit fleuve et Dixmude. Grâce à des
masses sans cesse renouvelées ils avaient pu franchir le cours d’eau,
et même dépasser le chemin de fer en occupant Ramscappelle et Perwyse.
Les troupes belges ont eu recours à la mesure suprême des inondations:
rompant les digues de l’Yser, tendant les barrages, nos amis ont amené
le flot insidieux dans la plaine basse des polders. En même temps,
aidés par nos troupes, ils enlevaient les villages occupés, et, sur
les chaussées dominant les eaux, ont refoulé les colonnes ennemies
du côté opposé, en leur infligeant des pertes considérables. Aux
dernières nouvelles, Belges et Français avaient à leur tour traversé
la rivière et se portaient vers la route d’Ostende à Dixmude où déjà
serait parvenue à Leffinghe une colonne qui longea les dunes, tandis
qu’une autre occupa Lombaertzyde le 3 novembre. Nous sommes donc près
d’Ostende.
Devant cette difficulté de se diriger vers la frontière française
par le littoral, devant l’inondation qui gagne chaque jour, l’ennemi
a porté son effort vers le Sud, contre la ville d’Ypres. Ne pouvant
aborder celle-ci par le Nord, ayant été chassé de Dixmude réduit en
cendres et se trouvant en présence de forces alliées victorieuses
occupant, entre Ypres et Roulers, les bourgs de Langemarck et de
Parschendaele, il a dû se diriger sur un front étendu entre Roulers
et Menin, où il a engagé de nombreux corps d’armée; depuis lors,
c’est au Sud-Est et au Sud d’Ypres que la bataille a lieu; elle fut
particulièrement ardente entre le canal d’Ypres à la Lys et le ruisseau
de la Douve, autour du village de Messines, situé à mi-chemin d’Ypres
et d’Armentières. Les positions ou points d’appui ont été pris et
repris plusieurs fois; Anglais et Français ont rivalisé d’ardeur dans
la résistance contre le flot allemand et dans les contre-attaques.
Les nouvelles du 4 novembre disaient que nous avions maintenu notre
front sur tous les points et que malgré des alternatives d’avance et
de recul, nous étions en progrès. Sur le reste du théâtre flamand
d’opérations, c’est-à-dire dans la Flandre française, autour des villes
populeuses de Lille, Roubaix, Tourcoing, Halluin et Armentières, le
silence a été complet, mais quelques indications furent fournies
sur les combats livrés par les troupes britanniques aux abords de
la Bassée. Les Allemands ont dirigé contre nos alliés de violentes
attaques, à l’aide de forces très supérieures en nombre. Un moment
obligés de reculer, les Anglais ont repris vigoureusement l’offensive,
repoussé l’ennemi et repris position en avant des points d’où ils
avaient été chassés. Toutes les attaques qui eurent lieu depuis dans
cette direction sont restées infructueuses. Il en fut de même jusqu’à
Arras, par les plaines de Lens et de Vimy.
A Arras, qui reste occupé par nous, l’ennemi a fait de violentes
tentatives les 1er, 2 et 3 novembre; tout en continuant le bombardement
de la malheureuse cité, il a cherché à parvenir au cœur de celle-ci;
mais nous tenions bon dans les villages de la banlieue immédiate et les
faubourgs; partout l’assaillant a été repoussé.
PICARDIE ET CHAMPAGNE
Les combats se sont poursuivis au Sud d’Arras jusqu’à l’Oise. Entre
Arras et la Somme, il semble que tout se soit borné à des attaques
contre nos positions, suivies de retours offensifs de notre part, nous
faisant gagner quelques points retranchés par l’adversaire. Mais plus
au Sud, en arrière, à l’Ouest de Roye et de Nesle, des deux côtés du
chemin de fer de Tergnier à Amiens, l’ennemi a renouvelé l’effort
entrepris depuis tant de semaines pour tâcher d’atteindre la capitale
picarde. Il n’y a pas réussi; c’est nous qui, vers le 30 octobre, avons
atteint, aux abords immédiats de Chaulnes, le bourg de Lihons, et, plus
au Sud, à quelque distance de Roye, le village du Quesnoy-en-Santerre.
Contre le rideau ainsi avancé vers l’Est, les Allemands ont dirigé de
furieuses tentatives, pendant trois jours; jusqu’au 3 novembre, tous
leurs efforts se sont brisés contre la ténacité de nos soldats appuyés
par notre puissante artillerie; même, le 4, nous faisions un nouveau
pas vers l’Est.
[Illustration: Ligne générale (en grisé) des opérations
militaires, à la fin d’octobre, de la mer du Nord à Nancy.
_Voir aussi la carte de la couverture et, pour la bataille des
Flandres, le croquis panoramique des pages 350-351._]
[Illustration: LA BATAILLE DES DUNES, SUR LA COTE BELGE, ENTRE
NIEUPORT ET OSTENDE
_Fac-similé d’un croquis exécuté sur place et résumant les
observations d’un dessinateur correspondant de guerre, M. H. C.
Seppings Wright, qui s’était posté près d’une ambulance belge
dans les dunes._]
[Illustration: UN VILLAGE DEUX FOIS PRIS PAR LES ALLEMANDS ET
DEUX FOIS REPRIS PAR NOTRE INFANTERIE
_Dessin exécuté par M. Sydney Adamson, à Sommesous (village de la
Marne, non loin de Vitry-le-François), d’après les indications
précises d’officiers ayant participé aux combats de septembre sur
ce point et qui ont certifié exacte la composition de l’artiste
anglais._]
Sur l’Aisne, des événements auxquels les communiqués allemands ont
donné une importance vraiment excessive se sont produits en amont de
Soissons, autour de la petite ville de Vailly. Nous avions entrepris
sur les plateaux de la rive droite de la rivière une marche en avant
qui, heureuse entre la forêt de Laigue et Soissons, a échoué sur
les plateaux au Nord de Vailly--près de Condé--nos colonnes s’étant
heurtées à des forces très supérieures. Cet insuccès fut compensé le
1er novembre par l’échec des Allemands qui tentaient de poursuivre leur
avantage par des attaques de jour et de nuit. Le 2, les Allemands,
une fois encore renforcés, nous faisaient reculer sur la rive droite
de l’Aisne jusqu’à Bourg-en-Comin, en amont de Vailly; mais mardi
nous reprenions l’offensive et approchions de Bray-en-Laonnois par la
reprise de la ferme du Metz. Depuis lors notre avantage s’affirme.
Sur le reste du front, en Champagne, les Allemands ont manifesté
une recrudescence d’activité se traduisant surtout par une violente
canonnade à l’aide de leur artillerie lourde et la reprise du
bombardement de Reims. Plus à l’Est, du 30 octobre au 2 novembre, nous
avons gagné de tranchée en tranchée au Nord de Souain, malgré une
action d’artillerie presque ininterrompue.
Dans l’Argonne, la bataille commencée la semaine dernière, à travers la
forêt, entre Vienne-la-Ville et Varennes, a continué toute la semaine.
Les Allemands, pour s’assurer la communication à travers ces grands
bois, nous ont attaqués avec fureur; chacune de ces tentatives a été
repoussée avec des pertes considérables pour l’ennemi, et, le mardi 3,
nous le rejetions au Nord du chemin de Varennes.
Sur la Meuse, dans le massif des Côtes et dans la Woëvre, il n’y a pas
eu moins d’activité; les Allemands cherchent évidemment à envelopper le
camp retranché de Verdun dans le but d’entreprendre le siège de cette
grande place. L’armée qui manœuvre de ce côté, vers Saint-Mihiel, en
Woëvre, au Nord de Verdun, a partout tenu l’ennemi à distance et gagné
sur lui; elle a dépassé Pont-à-Mousson et, sans doute, atteint la
frontière. Au Nord de Verdun, où le puissant fort de Douaumont avait
été canonné pendant vingt-quatre heures sans subir, d’ailleurs, le
moindre dégât, nos troupes ont obligé les assaillants à évacuer les
positions lointaines d’où ils essayaient le bombardement du fort.
Pendant que des détachements français opèrent dans la vallée
supérieure de la Seille, vers Château-Salins, l’ennemi a esquissé une
contre-offensive contre Nomény au Nord de Nancy; sa reconnaissance a
été rudement reçue et rejetée sur le territoire annexé.
Dans les Vosges moyennes, les Allemands maîtres du chaînon du
Ban-de-Sapt, qui se dirige du col de Saales vers Raon-l’Etape,
bombardaient presque journellement Saint-Dié; une brillante attaque
les a rejetés sur le versant alsacien pendant que d’autres forces,
franchissant le col de Sainte-Marie-aux-Mines, prenaient possession
des hauteurs au-dessus de la petite ville portant ce nom.
La semaine, on le voit, a été marquée par de nombreux événements de
guerre, mais c’est vers la Flandre surtout que s’est portée et que se
porte encore l’attention.
LES OPÉRATIONS RUSSES
Peu de nouvelles, cette semaine, mais elles sont excellentes en ce
qu'elles montrent les armées allemandes et autrichiennes obligées à
une retraite semblable à une déroute. Si, dans la Prusse orientale,
les Allemands résistent, grâce au réseau de lacs et de rivières qui
entourent Lyck, ils se replient au Sud de la Vistule vers la Wartha,
aussi rapidement que le permettent des routes boueuses transformées
en fondrières. Ils ont dû abandonner précipitamment la grande ville
de Lodz avec tous les approvisionnements qui y étaient réunis, et ils
continuent leur navrante retraite, poursuivis par les Cosaques.
Au Sud de la rivière Piliza, les vaincus d’Ivangorod avaient trouvé
des terrains de défense dans les forêts qui couvrent ce territoire. Du
24 au 28 octobre, Allemands et Autrichiens résistèrent avec une sombre
énergie, mais ils finirent par être rejetés, laissant Radom aux mains
de nos alliés. Aux confins de la Galicie, les Autrichiens n’ont pas été
plus heureux; ils sont refoulés dans la direction de Kielce et même
au delà. Sur le San, des combats ardents ont eu lieu, tournant tous à
l’avantage des Russes qui achèvent de réduire la forteresse de Przemysl.
DANS LES PAYS SERBES
Les hostilités se poursuivent entre les Serbes et les Autrichiens sans
qu’aucun résultat décisif soit obtenu. L’intérêt se porte plutôt vers
le mont Lovcen et les Bouches de Cattaro. Les batteries françaises,
installées sur la montagne, ne tarderont pas à avoir raison des
fortifications autrichiennes. Déjà plusieurs forts ont été détruits, et
le feu de nos pièces n’aura bientôt d’autre objectif que les navires
autrichiens enfermés dans ce golfe étrangement indenté et que bloque la
flotte anglo-française.
LA TURQUIE
Un grave événement s’est produit, transportant la guerre jusque dans la
mer Noire et dans le désert du Sinaï. Dans la nuit du 28 au 29 octobre,
deux contre-torpilleurs turcs, pénétrant dans le port d’Odessa, ont
coulé une canonnière russe et canonné le paquebot français _Portugal_.
Dans la matinée du jeudi 29, un croiseur a bombardé la gare et la
ville de Théodosia en Crimée. Le même jour, un autre croiseur, le
_Hamidieh_, faisait acte d’hostilité devant Novorossisk, à l’entrée de
la mer d’Azov. Cette agression en pleine paix a amené le rappel des
ambassadeurs français, anglais et russe à Constantinople, et la remise
des passeports aux ambassadeurs turcs dans les trois pays alliés.
Ces événements ont eu leur contre-coup aux confins de l’Afrique et de
l’Asie. L’armée russe du Caucase a franchi la frontière d’Arménie,
bousculant les postes turcs.
De leur côté, les Anglais, apprenant que les Turcs, avec leurs
contingents arabes, se préparaient à attaquer le canal de Suez sous
la direction d’officiers allemands, n’ont pas attendu l’exécution de
cette menace. Ils se sont portés au fond du golfe d’Akaba, qui, avec le
golfe de Suez, entoure la presqu’île du Sinaï, et ont attaqué le fort
d’Akaba, bâti à l’extrémité des rivages, sur la frontière même. Cette
forteresse, dont un officier allemand, dit-on, organisait la défense, a
été rapidement enlevée.
Enfin, à peine la rupture était-elle consommée que la flotte
anglo-française allait bombarder les forts des Dardanelles: elle ouvrit
le feu le 3 novembre à 5 heures du matin.
SUR MER
Pendant que la grande flotte anglaise maintient dans ses ports la
flotte allemande qui devait jouer un rôle si éclatant, et dont
aucune grande unité n’ose sortir; pendant qu’une escadre anglaise
participe à la bataille des Flandres; pendant que la flotte française
est maîtresse de l’Adriatique,--les croiseurs allemands des mers
lointaines continuent leurs exploits. Grâce à un odieux subterfuge,
en se maquillant en croiseur russe, l’_Emden_ a assailli et coulé à
Poulo-Pinang, dans la presqu’île de Malacca, un croiseur russe. Le
torpilleur français _Mousquet_ n’a pas craint de s’attaquer au gros
navire; mais la lutte était par trop inégale; le vaillant petit bateau
a été coulé à son tour.
EN AFRIQUE
La guerre s’étend au vaste continent africain. Les Anglais et les
Français ont conquis ce Cameroun dont les Allemands étaient si
fiers. De leur côté, les Allemands ont envahi l’Angola portugais;
la jeune république doit envoyer contre eux une escadre et un corps
expéditionnaire. Enfin, dans l’Afrique australe, les Allemands ont
soudoyé un traître, le colonel Maritz, qui s’est révolté contre les
Anglais. L’ancien général boer, Christian de Wet, s’est joint à lui
avec le général Beyers, mais un autre héros de la grande guerre
africaine, le général Botha, marche contre les insurgés et en a
rapidement raison.
ARDOUIN-DUMAZET.
LA DÉFENSE DE GERBEVILLER
C’est par suite d’une confusion, nous écrit un correspondant des plus
qualifiés, que M. Gabriel Louis-Jaray a attribué à une section de nos
admirables alpins la belle défense de Gerbeviller. Les alpins se sont
vaillamment battus partout où ils ont été engagés. Mais, à Gerbeviller,
c’est une section de chasseurs du 2e bataillon qui tint toute une
journée contre des forces considérables. L’adjudant qui commandait
cette section est aujourd’hui sous-lieutenant.
[Illustration: Composition des forces navales de la Russie et de
la Turquie dans la mer Noire.]
* * * * *
Corrections.
Page 341: «mon eaux» remplacé par «monceaux» (sous des monceaux
de paille).
Page 344: «higlanders» remplacé par «highlanders» (Officiers de
highlanders d’outre-Atlantique).
Page 353: «par» remplacé par «pour» (pour la bataille des
Flandres).
Page 356: «Aisme» remplacé par «Aisne» (sur la rive droite de
l’Aisne).
End of the Project Gutenberg EBook of L'Illustration, No. 3740, 7 Novembre
1914, by Various
*** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK L'ILLUSTRATION, NO. 3740, 7 NOV 1914 ***
***** This file should be named 59442-0.txt or 59442-0.zip *****
This and all associated files of various formats will be found in:
http://www.gutenberg.org/5/9/4/4/59442/
Produced by Juliet Sutherland, Hans Pieterse and the Online
Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net
Updated editions will replace the previous one--the old editions will
be renamed.
Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright
law means that no one owns a United States copyright in these works,
so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United
States without permission and without paying copyright
royalties. Special rules, set forth in the General Terms of Use part
of this license, apply to copying and distributing Project
Gutenberg-tm electronic works to protect the PROJECT GUTENBERG-tm
concept and trademark. Project Gutenberg is a registered trademark,
and may not be used if you charge for the eBooks, unless you receive
specific permission. If you do not charge anything for copies of this
eBook, complying with the rules is very easy. You may use this eBook
for nearly any purpose such as creation of derivative works, reports,
performances and research. They may be modified and printed and given
away--you may do practically ANYTHING in the United States with eBooks
not protected by U.S. copyright law. Redistribution is subject to the
trademark license, especially commercial redistribution.
START: FULL LICENSE
THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE
PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK
To protect the Project Gutenberg-tm mission of promoting the free
distribution of electronic works, by using or distributing this work
(or any other work associated in any way with the phrase "Project
Gutenberg"), you agree to comply with all the terms of the Full
Project Gutenberg-tm License available with this file or online at
www.gutenberg.org/license.
Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project
Gutenberg-tm electronic works
1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg-tm
electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to
and accept all the terms of this license and intellectual property
(trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all
the terms of this agreement, you must cease using and return or
destroy all copies of Project Gutenberg-tm electronic works in your
possession. If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a
Project Gutenberg-tm electronic work and you do not agree to be bound
by the terms of this agreement, you may obtain a refund from the
person or entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph
1.E.8.
1.B. "Project Gutenberg" is a registered trademark. It may only be
used on or associated in any way with an electronic work by people who
agree to be bound by the terms of this agreement. There are a few
things that you can do with most Project Gutenberg-tm electronic works
even without complying with the full terms of this agreement. See
paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project
Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this
agreement and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm
electronic works. See paragraph 1.E below.
1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation ("the
Foundation" or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection
of Project Gutenberg-tm electronic works. Nearly all the individual
works in the collection are in the public domain in the United
States. If an individual work is unprotected by copyright law in the
United States and you are located in the United States, we do not
claim a right to prevent you from copying, distributing, performing,
displaying or creating derivative works based on the work as long as
all references to Project Gutenberg are removed. Of course, we hope
that you will support the Project Gutenberg-tm mission of promoting
free access to electronic works by freely sharing Project Gutenberg-tm
works in compliance with the terms of this agreement for keeping the
Project Gutenberg-tm name associated with the work. You can easily
comply with the terms of this agreement by keeping this work in the
same format with its attached full Project Gutenberg-tm License when
you share it without charge with others.
1.D. The copyright laws of the place where you are located also govern
what you can do with this work. Copyright laws in most countries are
in a constant state of change. If you are outside the United States,
check the laws of your country in addition to the terms of this
agreement before downloading, copying, displaying, performing,
distributing or creating derivative works based on this work or any
other Project Gutenberg-tm work. The Foundation makes no
representations concerning the copyright status of any work in any
country outside the United States.
1.E. Unless you have removed all references to Project Gutenberg:
1.E.1. The following sentence, with active links to, or other
immediate access to, the full Project Gutenberg-tm License must appear
prominently whenever any copy of a Project Gutenberg-tm work (any work
on which the phrase "Project Gutenberg" appears, or with which the
phrase "Project Gutenberg" is associated) is accessed, displayed,
performed, viewed, copied or distributed:
This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and
most other parts of the world at no cost and with almost no
restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it
under the terms of the Project Gutenberg License included with this
eBook or online at www.gutenberg.org. If you are not located in the
United States, you'll have to check the laws of the country where you
are located before using this ebook.
1.E.2. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is
derived from texts not protected by U.S. copyright law (does not
contain a notice indicating that it is posted with permission of the
copyright holder), the work can be copied and distributed to anyone in
the United States without paying any fees or charges. If you are
redistributing or providing access to a work with the phrase "Project
Gutenberg" associated with or appearing on the work, you must comply
either with the requirements of paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 or
obtain permission for the use of the work and the Project Gutenberg-tm
trademark as set forth in paragraphs 1.E.8 or 1.E.9.
1.E.3. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is posted
with the permission of the copyright holder, your use and distribution
must comply with both paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 and any
additional terms imposed by the copyright holder. Additional terms
will be linked to the Project Gutenberg-tm License for all works
posted with the permission of the copyright holder found at the
beginning of this work.
1.E.4. Do not unlink or detach or remove the full Project Gutenberg-tm
License terms from this work, or any files containing a part of this
work or any other work associated with Project Gutenberg-tm.
1.E.5. Do not copy, display, perform, distribute or redistribute this
electronic work, or any part of this electronic work, without
prominently displaying the sentence set forth in paragraph 1.E.1 with
active links or immediate access to the full terms of the Project
Gutenberg-tm License.
1.E.6. You may convert to and distribute this work in any binary,
compressed, marked up, nonproprietary or proprietary form, including
any word processing or hypertext form. However, if you provide access
to or distribute copies of a Project Gutenberg-tm work in a format
other than "Plain Vanilla ASCII" or other format used in the official
version posted on the official Project Gutenberg-tm web site
(www.gutenberg.org), you must, at no additional cost, fee or expense
to the user, provide a copy, a means of exporting a copy, or a means
of obtaining a copy upon request, of the work in its original "Plain
Vanilla ASCII" or other form. Any alternate format must include the
full Project Gutenberg-tm License as specified in paragraph 1.E.1.
1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying,
performing, copying or distributing any Project Gutenberg-tm works
unless you comply with paragraph 1.E.8 or 1.E.9.
1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing
access to or distributing Project Gutenberg-tm electronic works
provided that
* You pay a royalty fee of 20% of the gross profits you derive from
the use of Project Gutenberg-tm works calculated using the method
you already use to calculate your applicable taxes. The fee is owed
to the owner of the Project Gutenberg-tm trademark, but he has
agreed to donate royalties under this paragraph to the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation. Royalty payments must be paid
within 60 days following each date on which you prepare (or are
legally required to prepare) your periodic tax returns. Royalty
payments should be clearly marked as such and sent to the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation at the address specified in
Section 4, "Information about donations to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation."
* You provide a full refund of any money paid by a user who notifies
you in writing (or by e-mail) within 30 days of receipt that s/he
does not agree to the terms of the full Project Gutenberg-tm
License. You must require such a user to return or destroy all
copies of the works possessed in a physical medium and discontinue
all use of and all access to other copies of Project Gutenberg-tm
works.
* You provide, in accordance with paragraph 1.F.3, a full refund of
any money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the
electronic work is discovered and reported to you within 90 days of
receipt of the work.
* You comply with all other terms of this agreement for free
distribution of Project Gutenberg-tm works.
1.E.9. If you wish to charge a fee or distribute a Project
Gutenberg-tm electronic work or group of works on different terms than
are set forth in this agreement, you must obtain permission in writing
from both the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and The
Project Gutenberg Trademark LLC, the owner of the Project Gutenberg-tm
trademark. Contact the Foundation as set forth in Section 3 below.
1.F.
1.F.1. Project Gutenberg volunteers and employees expend considerable
effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread
works not protected by U.S. copyright law in creating the Project
Gutenberg-tm collection. Despite these efforts, Project Gutenberg-tm
electronic works, and the medium on which they may be stored, may
contain "Defects," such as, but not limited to, incomplete, inaccurate
or corrupt data, transcription errors, a copyright or other
intellectual property infringement, a defective or damaged disk or
other medium, a computer virus, or computer codes that damage or
cannot be read by your equipment.
1.F.2. LIMITED WARRANTY, DISCLAIMER OF DAMAGES - Except for the "Right
of Replacement or Refund" described in paragraph 1.F.3, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation, the owner of the Project
Gutenberg-tm trademark, and any other party distributing a Project
Gutenberg-tm electronic work under this agreement, disclaim all
liability to you for damages, costs and expenses, including legal
fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT
LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE
PROVIDED IN PARAGRAPH 1.F.3. YOU AGREE THAT THE FOUNDATION, THE
TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE
LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR
INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH
DAMAGE.
1.F.3. LIMITED RIGHT OF REPLACEMENT OR REFUND - If you discover a
defect in this electronic work within 90 days of receiving it, you can
receive a refund of the money (if any) you paid for it by sending a
written explanation to the person you received the work from. If you
received the work on a physical medium, you must return the medium
with your written explanation. The person or entity that provided you
with the defective work may elect to provide a replacement copy in
lieu of a refund. If you received the work electronically, the person
or entity providing it to you may choose to give you a second
opportunity to receive the work electronically in lieu of a refund. If
the second copy is also defective, you may demand a refund in writing
without further opportunities to fix the problem.
1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth
in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS', WITH NO
OTHER WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT
LIMITED TO WARRANTIES OF MERCHANTABILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE.
1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied
warranties or the exclusion or limitation of certain types of
damages. If any disclaimer or limitation set forth in this agreement
violates the law of the state applicable to this agreement, the
agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or
limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or
unenforceability of any provision of this agreement shall not void the
remaining provisions.
1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the
trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone
providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in
accordance with this agreement, and any volunteers associated with the
production, promotion and distribution of Project Gutenberg-tm
electronic works, harmless from all liability, costs and expenses,
including legal fees, that arise directly or indirectly from any of
the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this
or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or
additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any
Defect you cause.
Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
electronic works in formats readable by the widest variety of
computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It
exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations
from people in all walks of life.
Volunteers and financial support to provide volunteers with the
assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
and permanent future for Project Gutenberg-tm and future
generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see
Sections 3 and 4 and the Foundation information page at
www.gutenberg.org
Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by
U.S. federal laws and your state's laws.
The Foundation's principal office is in Fairbanks, Alaska, with the
mailing address: PO Box 750175, Fairbanks, AK 99775, but its
volunteers and employees are scattered throughout numerous
locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt
Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to
date contact information can be found at the Foundation's web site and
official page at www.gutenberg.org/contact
For additional contact information:
Dr. Gregory B. Newby
Chief Executive and Director
[email protected]
Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation
Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
spread public support and donations to carry out its mission of
increasing the number of public domain and licensed works that can be
freely distributed in machine readable form accessible by the widest
array of equipment including outdated equipment. Many small donations
($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
status with the IRS.
The Foundation is committed to complying with the laws regulating
charities and charitable donations in all 50 states of the United
States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
with these requirements. We do not solicit donations in locations
where we have not received written confirmation of compliance. To SEND
DONATIONS or determine the status of compliance for any particular
state visit www.gutenberg.org/donate
While we cannot and do not solicit contributions from states where we
have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
against accepting unsolicited donations from donors in such states who
approach us with offers to donate.
International donations are gratefully accepted, but we cannot make
any statements concerning tax treatment of donations received from
outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
ways including checks, online payments and credit card donations. To
donate, please visit: www.gutenberg.org/donate
Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works.
Professor Michael S. Hart was the originator of the Project
Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be
freely shared with anyone. For forty years, he produced and
distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of
volunteer support.
Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in
the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not
necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper
edition.
Most people start at our Web site which has the main PG search
facility: www.gutenberg.org
This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.
Excerpt
Project Gutenberg's L'Illustration, No. 3740, 7 Novembre 1914, by Various
This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and most
other parts of the world at no cost and with almost no restrictions
whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of
the Project Gutenberg License included with this eBook or online at
www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you'll have
to check the laws of the country where you are located...
Read the Full Text
— End of L'Illustration, No. 3740, 7 Novembre 1914 —
Book Information
- Title
- L'Illustration, No. 3740, 7 Novembre 1914
- Author(s)
- Various
- Language
- French
- Type
- Text
- Release Date
- May 5, 2019
- Word Count
- 13,741 words
- Library of Congress Classification
- AP; D501
- Bookshelves
- L'Illustration, Browsing: History - General, Browsing: History - Warfare, Browsing: Journalism/Media/Writing
- Rights
- Public domain in the USA.
Related Books
Blackwood's Edinburgh Magazine, Vol. 67, No. 415, May, 1850
by Various
English
1403h 23m read
Blackwood's Edinburgh Magazine, Vol. 67, No. 413, March, 1850
by Various
English
1544h 52m read
Chambers's Journal of Popular Literature, Science, and Art, fifth series, no. 149, vol. III, November 6, 1886
by Various
English
285h 2m read
The Delinquent, Vol. IV, No. 8, August, 1914
by Various
English
233h 1m read
Chambers's Journal of Popular Literature, Science, and Art, Fifth Series, No. 148, Vol. III, October 30, 1886
by Various
English
287h 25m read
Trial of the major war criminals before the International Military Tribunal, Nuremburg, 14 November 1945-1 October 1946, volume 18
by Various
English
3940h 53m read